mercredi 19 avril 2023

Jean Giono et les arbres (suite)

 "Ce que j'aime dans les villes, ce sont les arbres qu'elles contiennent... Pour qui habite les villes à longueur d'année, il n'y a pas de motif de rêve et d'exaltation supérieur à celui que procure la vue d'un bel arbre bien vigoureux et bien vert. 
J'ai vu déjà qu'à certains endroits on avait substitué aux platanes un peu vulgaires le peuplier si fin, si élancé, et dont le feuillage fait le bruit des eaux courantes. Mais il y a encore des quantités de compagnons qui peuvent nous aider à vivre : le bouleau dont l'écorce  est semblable  à une peau de cheval ; le saule qui, par la bizarrerie de son architecture, mettrait dans les alignements une fantaisie dont nous avons bien besoin ; à noter encore que cet arbre a, au printemps, des rameaux rouges ; l'érable qui a sur le platane l'avantage  de ne pas produire de fruits à poussière irritante et qui, au surplus, a, dans son comportement habituel plus de noblesse, plus d'aristocratie de forme et de couleur. Des avenues célèbres ont été plantées de tilleuls. En mai, à l'époque des fleurs, le tilleul distille un exquis parfum de fraîcheur et d'amour. 
Il serait beau qu'après l'étude des terrains et des conditions climatologiques on fasse dans les villes des zones de verdure, d'ressences et de feuillages différents. Si je fais taire mon goût personnel pour le peuplier d'Italie et pour le tremble, on peut encore imaginer d'employer, ce que l'on fait parfois, les acacias, les lauriers-roses et les arbres à parfum.
Seuls dispensateurs de l'ombre et de la fraîcheur, du calme et de la raison, les arbres sont absolument nécessaires dans la nouvelle conception que les hommes se font des villes."
Jean Giono, La Chasse au bonheur, Gallimard, 1988, extraits des pages 148-150. 

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