- Le régime de nos internes des hôpitaux relève de La Case de l'oncle Tom, et nous sommes prêts à dépenser des centaines de milliards [francs] pour de prochains Jeux Olympiques.
- On croit pousser devant soi une idée en droite ligne quand déjà, par une courbe à grand rayon, elle vous entraîne sur le chemin du retour.
- Le plus important est d'avoir sous les yeux un monde dont l'aspect ne nous fasse pas vomir.
- Aller vite, c'est vieillir.
- Dès qu'on ne fait plus son bonheur soi-même, on est perdu.
- À ne produire que ce qui se vend, on finit par trouver tout naturel de se vendre soi-même.
- En vain, l'apparence emporte toujours nos sentiments au premier coup d’œil.
- Dès que la mode commence, elle se met partout, surtout si elle se réclame du progrès, ce qu'elle ne manque pas de faire.
- Nous ne savons généralement pas jouir de ce qui est et nous suspendons toujours notre bonheur à l'espérance du futur.
- Ce qui me bouscule force mon attention. J'ai peur ? La peur me distrait. Du moment que je ne suis pas trop à mon aise dans les fauteuils de la civilisation, je ne m'ennuie pas.
- Il ne serait venu à l'idée d'aucun de nous [les membres de la famille Giono] de réclamer du bonheur au social, de charger le social de faire notre bonheur : nous nous occupions nous-mêmes de cette affaire de première importance.
- Une race d'hommes bien domestiqués va désormais habiter la planète.
- La notion de progrès est une vue de l'esprit, elle n'existe pas dans la nature.
- Je pense exactement comme Mark Twain : "La civilisation, c'est la multiplication infinie de besoins dont on n'a pas besoin."
- Les hommes ne rêvent jamais dans le même sens ; ils ont chacun leur rêve particulier.
- Les grandes machines sociales qui font du bonheur un produit manufacturé ne livrent finalement que de la camelote.
- S'amuse qui veut, se cultive qui veut, fait son bonheur qui veut.
- Quoi que produise le médiocre, c'est un produit qui s'adresse au plus grand nombre.
- On n'atteint à l'unanimité, à l'adhésion des foules et aux sommets des honneurs que par la médiocrité.
- On abaisse chaque année le niveau des examens ; on en arrive dans cet ordre d'idée à promettre à l'avance le pourcentage des élus ; je me suis laissé dire qu'on donnait même des ordres pour qu'au moins soixante pour cent des présentés soient reçus, vaille que vaille, le siècle est au "repêchage".
- Il y a moins d'imbéciles au-dessus de trois mille mètres qu'au niveau de la mer.
- Un local, trois chaises, une table derrière laquelle il trône, il tonne et il détonne, le voilà heureux, persuadé qu'il possède la vérité, la science infuse, qu'il est le seul, qu'il a le droit de régenter, le droit de le faire, qu'il conduit le monde et l'univers au bonheur, à l'ordre, à la réglementation, au plan, à la statistique.
- Nous sommes menacés des pires futurs si nous continuons à nous divertir à la fortune du pot.
- Le monde est piégé. Il y a des appâts dans tous les coins. Nous passons beaucoup de temps à disposer des appâts dans toutes les avenues qui nous entourent ; plus de temps qu'il n'en faudrait pour perfectionner nos produits ou nous perfectionner nous-mêmes.
- Lécher ses blessures, c'est ce qu'on appelle avoir perdu ses illusions. on ne les perd jamais toutes.
Pensées tirées de Les Terrasses de l'île d'Elbe de Jean Giono, Gallimard, 1976. Recueil de chroniques parues en 1962 et 1963.
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