samedi 9 mai 2020

Paul Valéry s'est interrogé sur le progrès

"Je me suis essayé autrefois à me faire une idée positive de ce que l'on nomme progrès. Éliminant donc toute considération d'ordre moral, politique ou esthétique, le progrès me parut se réduire à l'accroissement très rapide et très sensible de la puissance (mécanique) utilisable par les hommes, et à celui de la précision qu'ils peuvent atteindre dans leurs prévisions. Un nombre de chevaux-vapeur, un nombre de décimales vérifiables, voilà des indices dont on ne peut douter qu'ils n'aient grandement augmenté depuis un siècle. Songez à ce qui se consume chaque jour dans cette quantité de moteurs de toute espèce, à la destruction de réserves qui s'opère dans le monde. Une rue de Paris travaille et tremble comme une usine. Le soir, une fête de feu, des trésors de lumière expriment aux regards à demi éblouis un pouvoir de dissipation extraordinaire, une largesse presque coupable. Le gaspillage ne serait-il pas devenu une nécessite publique et permanente ?" 
Paul Valéry, Regards sur le monde actuel, Œuvres II, Bibliothèque de la Pléiade, 1960, p. 1026. Paru en 1929.

Dans  Le Yalou (écrit en 1895, lors de la première guerre sino-japonaise), Paul Valéry met en épigraphe :
Civilisation, according to the interpretation of the Occident, 
serves only to satisfy men of large desires
Vicomte Torio.
Ibid., p. 1016.

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