mercredi 20 février 2019

pensées de Marcel Proust dans "Albertine disparue"

"Pour se représenter une situation inconnue l'imagination emprunte des éléments connus et à cause de cela ne se la représente pas."
Marcel Proust, Albertine disparue, Le Livre de Poche classique, 2009, p. 42.

"Le plagiat humain auquel il est difficile d'échapper , pour les individus (et même pour les peuples qui persévèrent dans leurs fautes et vont les aggravant), c'est le plagiat de soi-même.
AD, p. 58.

"C'est toujours une invisible croyance qui soutient l'édifice de notre monde sensitif, et privé de quoi il chancelle."
AD, p. 71.

"Les liens entre un être et nous n'existent que dans notre pensée. La mémoire en s'affaiblissant les relâche, et malgré l'illusion dont nous voudrions être dupes, et dont par amour, par amitié, par politesse, par respect humain, par devoir nous dupons les autres, nous existons seuls. L'homme est l'être qui ne peut sortir de soi, qui ne connaît les autres qu'en soi, et, en disant le contraire ment."
AD, p. 77.

"On croit que selon son désir, on changera autour de soi les choses, on le croit parce que hors de là on ne voit aucune solution favorable. On ne pense pas à celle qui se produit le plus souvent et qui est favorable aussi : nous n'arrivons pas à changer les choses selon notre désir, mais peu à peu notre désir change. La situation que nous espérions changer parce qu'elle nous était insupportable, nous devient indifférente."
AD, p. 79.

"Pour entrer en nous, un être a été obligé de prendre la forme, de se plier au cadre du temps ; ne nous apparaissant  que par minutes successives, il n'a jamais pu nous livrer de lui qu'un seul aspect à la fois, nous débiter de lui qu'une seule photographie."
AD, p. 114.

"Notre tort est de rester indifférent à la gentillesse, à l'intelligence des autres."
AD, p. 141.

"La douleur est un aussi puissant modificateur de la réalité qu'est l'ivresse."
AD, p. 168.

"Nous ne connaissons vraiment que ce qui est nouveau, ce qui introduit brusquement dans notre sensibilité un changement de ton qui nous frappe, ce à quoi l'habitude n'a pas encore substitué  ses pâles fac-similés."
AD, p. 184.

"Les jours anciens recouvrent peu à peu ceux qui les ont précédés, et sont eux-mêmes ensevelis sous ceux qui les suivent. Mais chaque jour ancien est resté déposé en nous comme dans une bibliothèque immense où il y a des plus vieux livres un exemplaire que sans doute personne n'ira jamais demander."
AD, p. 204.

"C'est seulement par la pensée qu'on possède des choses et on ne possède par un tableau parce qu'on l'a dans sa salle à manger si on ne sait pas le comprendre, ni un pays parce qu'on y réside sans même le regarder."
AD, p. 214.

"Comme il y a une géométrie dans l'espace, il y a une psychologie dans le temps, où les calculs d'une psychologie plane ne seraient plus exacts parce qu'on n'y tiendrait pas compte du Temps et d'une des formes qu'il revêt, l'oubli ; l'oubli dont je commençais à sentir la force et qui est un puissant instrument d'adaptation à la réalité parce qu'il détruit peu à peu en nous le passé survivant qui est en constante contradiction avec elle."
AD, p. 221-222.

"Nous n'avons de l'univers que des visions informes, fragmentées et que nous complétons par associations d'idées arbitraires, créatrices de dangereuses suggestions."
AD, p. 245.

"Comme certains bonheurs, il y a certains malheurs qui viennent trop tard, ils ne prennent pas en nous toute la grandeur qu'ils auraient eue quelque temps plus tôt."
AD, p. 285.

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