Lavoir de Neuville-sur-Ornain, Meuse
(actuellement salle des fêtes)
Charles Demoget (1827-1903), architecte, Bar-le-Duc, c. 1856
-
Le lavoir de Neuville-sur-Ornain
est couvert et à eau courante, mais son installation est telle et le système
employé est si heureusement combiné, que les inconvénients dont nous avons déjà
parlé ont tous été adroitement évités.
Le bâtiment qui le renferme se
compose d’une grande salle au milieu de laquelle se trouve le bassin de
rinçage ; à l’entrée, deux essoreuses pour sécher le linge ; au fond,
une cheminée et deux cuves pour la lessive.
A droite et à gauche, deux
constructions en ailes contiennent chacune un bassin de lavage pouvant occuper
ensemble 60 laveuses environ.
Les façades sont percées de
nombreuses ouvertures, placées à une grande hauteur du sol et dont la
décoration est d’une sobriété bien à sa place.
La charpente des combles est
apparente ; elle donne ainsi à l’intérieur une hauteur fort utile et très
profitable à la salubrité.
Le moyen employé par l’architecte
pour avoir des eaux de lavage toujours claires et propres, et au sujet duquel
il a bien voulu nous donner les renseignements nécessaires, est fort ingénieux
et en même temps d’une application facile et peu coûteuse, comme on peut en
juger par l’examen du décompte des dépenses.
Voici comment a été installé ce
système :
Les eaux ont été prises à 1700 m
du village sur le versant d’une colline qui a été drainée, et recueillies en
deux points placés à 14,03 m au-dessus du sol du lavoir. La conduite a été
établie en tuyaux de terre cuite d’Ollwiller (Haut-Rhin) ; ils sont
vernissés à l’intérieur et s’assemblent au moyen de manchons également en terre
cuite. Bien que cette conduite, établie en 1856, résiste à une forte charge,
aucun accident sérieux n’a encore été signalé. Elle traverse le canal, un
chemin de fer, deux routes et une rivière dans de petits aqueducs en
maçonnerie ; partout ailleurs elle est posée à 0,90 m sous le sol.
Arrivée près du lavoir, l’eau
monte dans une colonne verticale élevée contre la cheminée et qui porte à son
sommet une boîte en fonte divisée en trois compartiments par des cloisons. La
répartition de l’eau dans chaque compartiment se fait naturellement au moyen
d’échancrures rectangulaires, calculées suivant les débits, en sorte qu’il n’y
a pas de robinets et que la division de l’eau se fait seule malgré les
variations. L’eau est reprise dans une colonne de tuyaux en fonte qui l’amène
dans un bassin de rinçage circulaire placé au milieu du lavoir. Elle s’élance
en gerbe et retombe dans ce bassin, autour duquel les femmes rincent debout le
linge qu’elles viennent de laver à genoux dans les réservoirs.
Ce bassin a au fond un clapet de
vidange. Autour de la vasque centrale, quatre tuyaux de fonte prennent l’eau à
la surface et l’amènent sous les tables en pierre des bassins à laver, au moyen
de tuyaux en fonte percés de trous également espacés. L’eau propre vient donc
sortir sous chaque laveuse en un filet clair qui se renouvelle continuellement.
L’axe des bassins à laver porte des tuyaux verticaux percés de trous par
lesquels l’eau s’écoule dans des aqueducs de vidange. Il en résulte que l’eau
sale est toujours poussée en avant vers le centre ; à l’extrémité de
chaque bassin se trouve un clapet se manœuvrant par une vis qui sert à en
vider le fond et même à écouler l’eau trop sale au fond, en le soulevant
légèrement.
Ainsi, on le voit, l’eau n’arrive
plus que quand elle est nécessaire, la boîte de distribution ne la transmet que
par quantités régulières, le lavage s’opère toujours dans l’eau propre, les
eaux sales sont rapidement entraînées, et la vidange des bassins se fait sans
difficultés.
La construction a été très soignée
et a donné lieu à une dépense totale de 14.103,70 francs.
Félix Narjoux, "Lavoir à Neuville-sur-Ornain (Meuse)" dans Architecture communale, série 1, Paris, Vve A. Morel et Cie, Libraires-Editeurs, 1870, p. 72-74.
Félix Narjoux, idem, série 2, planches XCII, XCIII et XCIV.
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