"Près d'Agen s'élevait une colline où avait été martyrisé un saint Vincent gallo-romain qu'il ne faut pas confondre avec le saint Vincent espagnol. Saint Vincent d'Agen avait été mis à mort par les païens pour avoir tourné en dérision le culte qu'ils rendaient au soleil en faisant descendre une roue enflammée dans la vallée au moment du solstice d'été."
"Après les travaux de Gaidoz et le beau Manuel d'archéologie préhistorique de Déchelette, il paraît certain que la roue était pour les peuples de la Gaule et pour tous les peuples du Nord le symbole du soleil."
"La roue se rencontre assez fréquemment sur les chapiteaux romans. On la trouve notamment sur les chapiteaux très anciens et très barbares de Chivy dans l'Aisne et de Fouesnant en Bretagne. La roue est-elle là un ornement quelconque ou bien avait-elle conservé au XIe siècle quelque chose de la signification originelle ? La question peut paraître singulière ; il semble que ce monde d'antiques croyances ait été alors bien oublié, mais il n'en était pas ainsi. La roue celtique, symbole du soleil, était associée au Moyen Âge à la fête de saint Jean-Baptiste. Ce jour-là, on attachait de la paille autour d'une roue, on y mettait le feu, et on la faisait descendre sur la pente d'une colline. C'est exactement de la sorte que les Gallo-Romains honoraient le dieu solaire qui était adoré dans le temple de Vernemetum, près d'Agen. C'est pour s'être moqué de cette cérémonie que saint Vincent fut mis à mort au IIIe siècle. L'église du Moyen âge avait été obligée de tolérer cette pratique, mais elle l'avait mise sous le patronage de saint Jean-Baptiste, dont c'était la fête. Sur l'habitude de faire rouler une roue le jour de la fête de saint Jean-Baptiste, nous avons ce texte formel de Jean Beleth, liturgiste du XIIe siècle : In festo Johannes Baptistae, rota in quibusdam locis volvitur. Guillaume Durand dit la même chose au XIIIe siècle. Dans certains villages de la Lorraine, au commencement du XXe siècle, on faisait encore descendre des roues enflammées sur la pente des collines le jour de la fête de saint Jean-Baptiste. Il se pourrait donc fort bien qu'au XIe siècle, la roue ait conservé, pour les sculpteurs romans, quelque chose de sa signification primitive."
Émile Mâle, La fin du paganisme en Gaule et les plus anciennes basiliques chrétiennes, Paris, Flammarion Éditeur, 1962, p. 166, 307 et 311-312.
La roue enflammée de Contz-les-Bains, Moselle :
Francis André-Cartigny, La roue enflammée de Contz-les-Bains : des rites, des fêtes et du langage de la vallée de la Moselle, Knutange, Éditions Fensch-Vallée, 2000.
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