mercredi 28 septembre 2022

la place Stanislas entrevue la nuit par Jean-Pierre Clavel

"La voiture s'arrêta devant une cour entourée de hangars, à l'Hôtel de l'Europe, comme on le voyait écrit en grosses lettres sur la façade. Le conducteur vint nous ouvrir, et dit que nous avions une demi-heure. Tout le monde sortit. Qu'est-ce que je pouvais faire au milieu de la nuit, dans une ville que je ne connaissais pas ? Un monsieur, avec une serviette sur le bras, demanda si l'on voulait prendre quelque chose ; deux ou trois le suivirent dans le grand hôtel, les autres se dispersèrent à droite et à gauche. Moi j'allai m'asseoir dehors sur un banc, au clair de lune. Je voyais une grande rue qui descendait, au bout de la rue une grille magnifique en fer massif et doré, plus loin une place ; et devant une sorte de palais, une sentinelle qui se promenait sur le trottoir.
Je n'avais jamais rien vu d'aussi beau, d'aussi grand que cette rue, cette grille et cette place. Je descendis jusqu'à la grille et je regardai. Tour dormait ; on entendait, bien loin derrière, les gens de notre diligence parler, les domestiques emmener les chevaux ; et devant le palais, où la lune brillait sur les grandes vitres, les pas de la sentinelle.
J'aurais voulu voir plus loin à gauche deux fontaines couvertes d'arbres, dont l'eau tombait dans l'ombre, et une statue très grande au milieu de la place, mais j'avais peur de revenir trop tard, et je vins me rasseoir sur mon banc, pour être là quand notre voiture repartirait."
Erckmann-Chatrian, Histoire d'un homme du peuple. Contes et romans nationaux et populaires, tome 9, Jean-Jacques Pauvert, Serpenoise, Tallandier, 1988, p. 90-91.

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