dimanche 16 mars 2025

une anaphore de Boualem Sansal dans Le Village de l'Allemand

"Derrière la logique froide du mécanisme était le mystère virulent de la mort qui étreignait le camp, il y avait les lois abominablement injustes du hasard qui, ici plus qu'ailleurs, accompagnait chaque instant le détenu, qui l'observait, qui faisait que le choix pour telle corvée, telle punition, se portait sur lui, une fois de plus, qui faisait que la maladie le frappait lui plutôt qu'un autre et cela signifiait la mort immédiate ; il y avait cette magie des choses qui voulait que des incidents anodins, nés à la marge, se mettent subitement à s'enchaîner les uns aux autres pour venir comme une grosse catastrophe enrayer la superbe et inaltérable machine, affolant ses maîtres, les humiliant jusqu'au sommet, libérant en contrecoup de terribles colères, des actes gratuits, des châtiments en cascade, et des jours et des semaines de privation ; il y avait le mystère du temps qui s'étirait à l'infini, jusqu'à anéantir toute volonté, tout espoir, tout regret même, puis se contractait subitement, étranglait son monde, mettait de la précipitation dans le moindre mouvement, se faisait garrot impitoyable rendant chaque minute plus lourde, chaque seconde plus incertaine ; et il y avait le climat et ses humeurs, et ses tortures, la rumeur et ses fièvres, il y avait la promiscuité et sa honte, et ses réactions épidermiques, il y avait la faim, perpétuelle, délirante, et les odeurs qui soulèvent le cœur, il y avait la terrible perte de conscience morale qui faisait du déporté le pire ennemi du déporté,  chacun ayant scellé une alliance avec la faim, l'instinct de survie et la folie, et il y avait ces innombrables petites choses du quotidien qui pouvaient à tout moment prendre une tournure tragique ; mon Dieu quel drame qu'une chaussure volée ou un bonnet égaré en hiver, un regard de trop sur un officier, une seconde d'inattention,  une gamelle qui se fend, une foulure au pied, une dysenterie, une lombalgie, une plaie qui s'infecte ; il y avait cette tension épuisante pour toujours paraître en état de travailler et ne jamais éveiller le soupçon ; il y avait ce malstrom que l'on portait dans sa tête vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ces angoisses purulentes, ces questions sans fin, des exaltations morbides, des peurs d'enfants, des besoins lancinants, des rêves impossibles, des souvenirs fugaces d'une autre vie, dans un monde où existerait un soleil, où le jour et la nuit sont une grâce que l'on partage avec d'autres."
Boualem Sansal, Le Village de l'Allemand ou le Journal des frères Schiller, Gallimard, 2008, p. 240-241. 

samedi 15 mars 2025

la pièce de monnaie dans Solénoïde de Mircea Cărtărescu

"J'ai gardé longtemps le médaillon kitsch reçu quand j'avais sept ans, de la main de touristes étrangers dont les cars s'arrêtaient au Cirque d'État... J'avais donc dans les sept ans quand une femme qui descendait tout juste du car, vêtue d'une robe imprimée et portant des boucles d'oreilles rondes et roses, m'a souri et a posé dans ma main ce médaillon doré, en laiton... J'ai examiné mon cadeau de près : il brillait de mille feux sous le soleil d'été. C'était une pièce de monnaie, dorée, dans un cadre en métal. Les deux côtés de la pièce de monnaie portaient des lettres : A, O, et R d'un côté, M et U de l'autre. Quelques jours ont passé et j'ai déchiffré le mystère par hasard quand je lui ai donné une pichenette et qu'elle s'est mise à tourner si vite sur les petits pivots du cadre en métal qu'elle s'est transformée en un globe d'or fin, semi-transparent, comme la boule d'aigrettes du pissenlit, avec ce mot fantomatique au milieu, AMOUR. C'est ainsi que je vois ma vie, ainsi que je pense avoir toujours été : le monde ordinaire, terne et tangible, sur l'avers de la pièce,  et, sur le revers, le monde onirique de mon esprit, monde secret, intime, fantasmagorique. Seule la rotation, seuls le vertige, le syndrome vestibulaire, le doigt insouciant du dieu qui met la monnaie en mouvement et lui donne ainsi une dimension en plus, rendent visible, mais pour quels yeux, l'inscription gravée dans notre esprit, sur chacune de ses deux faces, sur le jour et la nuit,  sur la lucidité et le rêve, sur la femme et l'homme, sur l'animal et le dieu, et que nous ignorons éternellement parce que nous ne pouvons pas voir les deux faces en même temps."
Mircea Cărtărescu, Solénoïde, collection Points Signatures, 2021, p. 112-113.

un pêcheur au bord du lac du Mirgenbach



Un pêcheur du mois de mars au bord du lac du Mirgenbach
Cattenom

Confederate Museum - New Orleans


 Confederate Museum - Louisiana Historical Association
The Arts District - New Orleans
photo JLJ 1995

vendredi 14 mars 2025

le barrage du lac du Mirgenbach, centrale de Cattenom










Le barrage du lac du Mirgenbach en hiver
Centrale de Cattenom

mercredi 12 mars 2025

Adrienne Jouclard, Moisson à Onville


 Adrinne Jouclard, Moisson  à Onville

Roland Grünberg, Tête de sanglier


Roland Grünberg, Tête de sanglier

lundi 10 mars 2025

Jan Monchablon, Dans les champs


Jan Monchablon (Châtillon-sur-Saône, 1854 - 1904), Dans les champs
hst - 38 x 55 cm - sbd et 1887
Millon - Paris - 25.03.2025

vendredi 7 mars 2025

les barres, une répétition


jeudi 6 mars 2025

l'alligator de Garche


la collection du baron de Salis exposée à la Porte des Allemands de Metz


 L'extraordinaire collection du baron de Salis
Exposition à la Porte des Allemands - Metz
1er mars - 18 mai 2025

Cette exposition des Bibliothèques Médiathèques de Metz dévoile au public l’extraordinaire richesse de l’ensemble réuni par le baron Louis-Numa de Salis, légué à la ville de Metz en 1892, depuis les chartes et manuscrits médiévaux jusqu’aux gravures des plus grands artistes lorrains (Callot, Leclerc), en passant par de très beaux incunables, livres illustrés, et documents d’archives.

mercredi 5 mars 2025

tulipes dans un vase en cristal de Bohême




 Nulle fleur du jardin n'égale ma splendeur
(un vers du poème La Tulipe de Théophile Gautier)

le piège américain

mardi 4 mars 2025

sceau de la Ville de Verdun, XIIIe-XIVe siècle


 Sceau de la Ville de Verdun explicité par Hubert Collin
XIIIe-XIVe siècle 
Matrice du sceau conservée au Musée de la Princerie - Verdun
-
"Ce sceau vaut à lui seul une grande leçon d'archéologie monumentale, car il représente fidèlement la cathédrale romane de Verdun avant les transformations du XIVe et du XVIIIe siècle. La cathédrale est formée d'une longue nef basilicale flanquée de bas-côtés. On distingue nettement les fenêtres hautes et celles des bas-côtés. Au milieu, se voit le portail principal qui est latéral, emplacement très classique en Lorraine. La cathédrale est pourvue de deux transepts : leurs murs-pignons se voient de part et d'autre du portail. Quatre hautes tours carrées axillaires sont logées dans les angles formés par la rencontre des transepts et des deux chœurs opposés. De ces deux chœurs, seul celui de gauche, le chœur oriental est ici visible avec le pignon de la nef. Ce chœur est celui de l'architecte Garin. Il fut édifié, avec les tours qui l'accompagnent, avant 1144, date connue par la chronique de Laurent de Liège. Le reste de la cathédrale, nef, deuxième transept et chœur occidental avec les tours de ce côté, est plus ancien. La construction remonterait à l'évêque Heimon (990-1024) et fut reprise, selon la chronique verdunoise, par Thierry le Grand de 1048 à 1083."
Hubert Collin, "L'histoire de Verdun tirée des archives", dans Trésor d'un millénaire. Dix siècles d'art et d'histoire autour de la cathédrale de Verdun, Verdun, A.C.C.V., 1990, p. 71-72.

lundi 3 mars 2025

désolation


le pont


Eishōsai Chōki, La chasse aux lucioles


Eishōsai Chōki, La chasse aux lucioles la nuit
estampe, 1790
Exposition Contemplations japonaises - 17 janvier - 8 mars 2024
Puzzle - Thionville 

dimanche 2 mars 2025

Hiroshige, Vue de l'étang Shinobazu enneigé à Ueno


 Hiroshige, Vue de l'étang Shinobazu enneigé à Ueno
partie centrale du triptyque, 1846-1848
Exposition Contemplations japonaises - 17 janvier - 8 mars 2024
Puzzle - Thionville

samedi 1 mars 2025

est-elle terminée la fête ?

"La fête, puissante et solennelle montagne, leur cachait l'horizon. Ils étaient tous convaincus qu'elle n'amenait pas seulement dans leur vie un changement passager, mais une transformation complète. Au dernier instant, ils furent pris de peur devant leur ouvrage. De son propre mouvement, la fête se mettait à leur adresser de joyeux signes et de dangereuses menaces. Elle assombrissait le ciel, elle l'éclaircissait. On brossait et l'on repassait les tenues de gala. Même le capitaine Lorenz n'osait pas faire, ces jours-là, sa partie de billard. La douillette tranquillité où il avait résolu de passer la fin de sa vie militaire était détruite. Il considérait sa tunique de cérémonie avec des regards de méfiance et ressemblait à un cheval gras resté longtemps dans l'ombre fraîche de l'écurie et que l'on contraint brusquement à prendre part à une course de trot."
Joseph Roth, La Marche de Radetzky, Points Seuil 2008, p. 349.

vendredi 28 février 2025

après-midi d'hiver


 Après-midi d'hiver au parc Wilson de Thionville

Lisa Romain, Boualem Sansal à l'épreuve du réel


 Lisa Romain, Boualem Sansal à l'épreuve du réel
 Éditions du Cerf, janvier 2025, 640 pages
-
Spécialiste éminente de Boualem Sansal, Lisa Romain montre comment il a façonné une littérature de l’indicible, malgré le doute, les obstacles et le silence. Comment il a forgé un discours engagé, en liberté. Ses romans, ses essais, ses nouvelles, tous récompensés de nombreux prix, témoignent de ce souci du réel, de cette conscience de l’histoire et de cette quête toujours renouvelée de la vérité.
Boualem Sansal prend le lecteur à témoin et s’en remet à lui. Écoutons-le en retour. Voici le message d’une grande conscience de notre temps.
Agrégée de lettres modernes et docteure en littérature de l’université de Lille, Lisa Romain a consacré sa thèse à l’œuvre littéraire de Boualem Sansal.

jeudi 27 février 2025

les constellations du Grand Chien et de la Petite Ourse, église St-Joseph de Montigny-lès-Metz

 


Les constellations du Grand Chien et de la Petite Ourse
Église Saint-Joseph - Montigny-lès-Metz

mercredi 26 février 2025

une anaphore dans "La Marche de Radetzky" de Joseph Roth

"Le sous-lieutenant Trotta fit dix-sept heures de chemin de fer. À la dix-huitième surgit la gare la plus orientale de la monarchie. Il y descendit. Onufrij, son ordonnance, l'accompagnait. La caserne de chasseurs était au milieu de la petite ville. Avant de mettre le pied dans la cour, Onufrij se signa trois fois. C'était le matin. Le printemps, qui régnait depuis longtemps à l'intérieur de l'empire, ne s'était installé ici que depuis peu. Pourtant, déjà, le cytise flambait sur les talus de la voie ferrée. Déjà, les violettes fleurissaient dans les bois humides. Déjà, les grenouilles coassaient dans l'infini des marais. Déjà, les cigognes tournoyaient au-dessus des rustiques maisonnettes aux toits de chaume, à la recherche des vieilles roues, fondations de leur demeure estivale."
Joseph Roth, La Marche de Radetzky, Points Seuil, 2008, p. 158.

Arthur Unger, Midnight Dancers


 Arthur Unger, Midnight Dancers
1990, psychogramme, 73,5 x 97,5 cm
Exposition Arthur Unger. Un regard autre
Château de Courcelles - Montigny-lès-Metz
8 février - 30 mars 2025

la péniche Happiness de Bruges passant à Thionville



 La péniche Happiness de Bruges passant à Thionville le 18 février 2025